MENU
Lyon : une métamorphose à l’horizon 2030

Lyon : une métamorphose à l’horizon 2030

58 heures par an

58 heures par an

Bruxelles : que faire des autoroutes urbaines ?

8 March 2016 Comments (0) Mobilité

Bruxelles : que faire des autoroutes urbaines ?

Témoignages d’une partie de notre histoire post-industrielle pour d’uns, cicatrices qui balafrent la capitale pour d’autres, les autoroutes urbaines bruxelloises voient leur avenir remis en question : qu’allons-nous faire de ces voies à plusieurs bandes qui jalonnent Bruxelles ?

Les autoroutes urbaines sont apparues en Belgique à partir des années 50 et 60. Elles s’inspirent du modèle américain qui y voyait un moyen de traverser à pleine vitesse une métropole de part en part, sans rencontrer le moindre feu de signalisation. Leur développement coïncide avec la popularisation des automobiles et un contexte économique florissant qui voit également dans l’autoroute un moteur de croissance de l’activité industrielle.

Carrefour de l’Occident

Les voies rapides urbaines traduisent également le poids du secteur de l’assemblage automobile en Belgique : construire des autoroutes et inciter les citoyens à acquérir une voiture permettent de faire tourner l’économie. À Bruxelles, l’Exposition Universelle de 1958 donne un coup de fouet aux projets autoroutiers urbains. « La volonté politique était de faire de Bruxelles un “Carrefour de l’Occident”, pour employer les termes utilisés à l’époque, explique Gery Leloutre, architecte urbaniste du bureau bruxellois Karbon et chercheur à la Faculté d’Architecture La Cambre – Horta (ULB). Mais il n’existait pas vraiment de vision intégrée, ni au niveau de la ville, ni au niveau du pays. On s’est donc lancé dans de vastes projets tels que l’arrivée de l’autoroute E40, le rond-point Schuman, les viaducs Reyers et Herrmann-Debroux, etc. Il était même prévu à un moment de couvrir une portion de la ligne de train 161 Bruxelles – Namur d’une bande autoroutière. »

L’autoroute urbaine est vue à l’époque comme une solution radicale de gestion des flux à l’intérieur même de la ville, mais sans véritable vision concertée. Ministre des Travaux publics de 1965 à 1973, Jos De Saeger résumait à l’époque cette vision : « Il semble peu sensé de réduire les distances entre deux centres par la construction d’une autoroute si, en même temps, il devient de plus en plus dur et de plus en plus long d’entrer et de sortir de ces centres. »

Mythe écorné

Quelques décennies plus tard, difficile de nier l’échec du mythe de l’autoroute urbaine. Dès 1969 déjà, un moratoire met un terme à ces projets à Bruxelles, qui se recentre sur les grands boulevards urbains. Le moteur de développement s’est surtout transformé en une plaie qui coupe les villes, génère du bruit et de la pollution. Pire, les quartiers traversés par les voies rapides ont perdu de leur attrait.

« Les villes sont faites pour les gens, les autoroutes pour les véhicules. L’essence d’une ville se compose d’un réseau de rues interconnectées, qui stimulent les échanges entre les quartiers, les entreprises et les résidents. Les autoroutes urbaines rompent cette dynamique et deviennent une entrave au commerce et à la culture », résume Peter J. Park qui, en tant que Directeur de la planification urbaine dans la ville de Milwaukee, a supervisé le démantèlement d’une de ces autoroutes.

À partir des années 80 et 90, commencent alors les projets de démantèlement et de requalification, avec en point de mire cette question : comment trouver le bon équilibre entre la qualité de vie, la place des transports publics et l’automobile dans la ville ?

« L’automobile répond encore à certains besoins, en particulier en Belgique où nous avons fait le choix d’une forme de dispersion urbaine, tempère Gery Leloutre. Nous devons dès lors réfléchir à des solutions pour diminuer le poids de la voiture sur la ville. Mais imaginer Bruxelles sans voiture ne me semble pas réaliste. »

Héritage

Les autoroutes urbaines bruxelloises ont également façonné l’aspect métropolitain de la ville et stimulé l’émergence de nombreuses tours et quartiers d’affaires. En effacer les traces, c’est également gommer une partie de l’histoire de Bruxelles. « Avant d’agir sur l’arrivée de la E40 jusque Reyers, n’oublions pas que cette bande fait également partie de notre patrimoine urbain, qu’il serait idiot de détruire par principe. On pourrait la conserver et lui affecter une autre utilité. Je ne dis pas qu’il faut absolument y faire rouler des voitures. Mais d’autres solutions que la destruction pure et simple sont à envisager », conclut Gery Leloutre.

Photo © Thomas-Xavier Christiane
Partagez cet article :

Tags: ,

Comments are closed.